Livre : « Boriben » ou le difficile itinéraire d’une migrante

Dans son tout premier livre, publié aux éditions La Sahélienne, Yacouba Issoufi Maïga expose le difficile itinéraire de Boriben.

Son héroïne est une mère de famille en quête d’eldorado pour sa fille. Migration illégale.

À la recherche d’une heureuse vie , Boriben, synonyme de beauté physique, d’intégrité, de probité et d’amour, des qualités « auxquelles aspirent tous les êtres humains sur terre », connaît l’enfer sur terre.

Du Libéria à Rome, en passant par Abidjan, Ouagadougou, Agadez, Tripoli et Tunis, quelle souffrance Boriben Birdji et sa fille Nana (enfant du monde) n’ont pas traversé à la recherche d’un eldorado. Nana aspire à un succès international dans la mode italienne. Un idéal qui semblait malheureusement fuir à chaque fois que ce couple mère-enfant espérait l’atteindre.

Le sous-titre de l’ouvrage, « Fermez ports et aéroports, je viendrai quand même », semble bien souligner toutes les difficultés à éradiquer ce phénomène de la migration illégale. Ce, malgré des mesures draconiennes prises par des pays occidentaux.

« Fiction et réalité y alternent …»

« Boriben, comme la majeure partie de ceux qui avaient fui la violence et la précarité, s’était réfugiée dans les pays voisins. Elle était partie, parce qu’au-delà de la haine qu’elle éprouvait contre la violence des hommes, elle voulait donner à sa fille Nana, la vie dont elle avait toujours rêvé, mais qu’elle n’avait jamais pu s’offrir », peut-on lire dans ce roman publié en 2021.

La soif, la famine, la peur, la traite des personnes, la violence, surtout dans des zones contrôlées par des groupes armés, des narcotrafiquants, sont le sort de ces hommes et femmes qui traversent le désert ou la méditerranée, à la recherche d’un idéal. Comme l’a remarquablement souligné le préfacier, Ario Issoufi Maiga, professeur de lettres et inspecteur d’Enseignement fondamental : dans cet ouvrage, « fiction et réalité y alternent ou s’entremêlent pour en constituer la trame ».

 « L’acceptation d’oser penser et inventer »

Dans une région où sévit une véritable crise sécuritaire, comment parler de la migration sans évoquer ce phénomène qui colle à la peau de ces migrants. Elle est l’une des réalités qu’ils fuient, mais qu’ils rencontrent tout au long de leur chemin.

Boriben ne se contente pas de dénoncer cette migration illégale, il propose également des voies et moyens pour résoudre ce phénomène. Le salut des pays africains « réside dans l’acceptation d’oser penser et inventer leur propre modèle de développement fondé sur les valeurs africaines endogènes enrichies par des emprunts positifs issus des sciences et des technologies occidentales », lit-on dans la Préface.

Fousseni Togola

Prix de la Rentrée littéraire du Mali : deux ouvrages honorent La Sahélienne cette année

Depuis treize ans, la Rentrée littéraire du Mali tente, tant bien que mal, de redynamiser le secteur du livre à travers cafés littéraires, dédicaces dans les écoles, débats d’idées, rencontres professionnelles, propositions artistiques et autres activités. Organisée par le Fonds des prix littéraires, la Rentrée littéraire du Mali est aussi et surtout le moment annuel des prix littéraires du Mali.

Comme à l’accoutumée, des œuvres éditées aux Editions La Sahélienne ont été distinguées :« Prêtre Autrement : déboires et espoirs d’un prêtre paraplégique » de Jean Somboro et « Le livre d’Elias » de Chab Touré. Le premier a eu le prix spécial du jury et le second, celui de l’Union européenne qui récompense un premier roman.

Publié en août 2020, dans la Collection mémoire, « Prêtre Autrement » est un récit de vie. L’auteur décrit son processus de renaissance et de reconstruction après avoir été victime d’un grave accident de voiture.

Prêtre et formateur au Grand séminaire Saint-Augustin de Bamako, M. Somboro sera mis à l’épreuve le 27 août 2010, lorsqu’en voulant éviter un âne blanc sur la digue entre Sévaré et Mopti il subit un grave accident qui bouleversa toute sa vie. Une épreuve qui permettra à l’homme d’Église de se découvrir et de mieux renouer avec sa foi en Dieu. Il s’agit d’un ouvrage fortement humaniste qui promeut les valeurs du vivre ensemble, de la solidarité, de la foi, etc.

Quant au « livre d’Elias », comme le dit son auteur « est le portrait d’une société malienne troublée mais, où l’amour et l’amitié, la passion et les émotions courent encore dans les plis de vieilles blessures. »

À nos confrères de la Radio France internationale (RFI), l’auteur confie avoir écrit cet ouvrage parce qu’il se trouvait « dans une incompréhension totale » de tout ce qui lui arrivait ainsi qu’à son entourage. « Tout était et tout semblait chamboulé », souligne-t-il.

Bien que chaque année, ses auteurs remportent des prix littéraires, l’éditeur Ismaila Samba Traoré est ému et honoré par ces deux prix, qui témoignent de la qualité du travail qu’effectue l’équipe de La Sahélienne, « leader de l’édition malienne ».

Notons que les prix Massa Makan Diabaté et Ahmed Baba sont revenus cette année à Ibrahim Lanséni Coulibaly et au Sénégalais Kalil Diallo.

Fousseni Togola

Source : Phileingora

L’Écrivaine Assia Boucary MAIGA, sur son ouvrage « Quand la Pureté engendre l’Ordure ».

Une Plume poignante et virulente qui traite presque tous les maux qui explosent le continent africain de nos jours.

《JE NE SUIS NI POUR LES AFRICAINS NI CONTRE LES OCCIDENTAUX》.

La petite boutique contiguë à la maison de l’écrivaine, est affluente de quelques gaillards timides et indifférents de toutes ces problématiques concernant l’Afrique, traitée dans le livre virulent d’Assia. Comme toutes les femmes africaines authentiques, l’auteure de « Quand la Pureté engendre l’ordure » était en train de préparer le déjeuner. Avec ses gros yeux et sa voix douce même si sa plume dit tout le contraire du son de sa corde vocale. Habitants dans le quartier Yirimadjo zerni, dans la mégalopole Bamakoise.

« Quand la Pureté engendre l’ordure » est un livre de six chapitres qui traitent avec intransigeance et virulence les problématiques qui abîment le continent noir. Un discours qui est celui d’une essayiste de la nouvelle génération. Une œuvre d’actualité, une nouvelle voix vient de s’embarquer dans le débat.

Reflet d’Afrique : Quels messages comptez-vous lancer à travers le titre de votre livre « Quand la pureté engendre l’ordure.. » ?

Assia Boucary MAIGA : D’abord, comme son nom l’indique. Ici « la pureté » symbolise le continent africain, qui est un continent naturellement riche en tout. Mais qui a engendré malheureusement aujourd’hui beaucoup des scélérats. Dirigeants, qui ont fait de cette Afrique ce qu’elle est de nos jours.

Reflet d’Afrique : Votre plume est virulente contre les dirigeants africains, de même sur les pratiques des pays occidentaux en Afrique, plus précisément la France. Quelle ligne défendez-vous concrètement ?

Assia Boucary MAIGA : Je ne défends ni l’Occident, ni l’Afrique.

Reflet d’Afrique : Mais vous êtes la voix de quelle classe sociale ?

Assia Boucary MAIGA : Je suis pour la justice. Je défends les plus faibles. Ce n’est pas pour l’Afrique que je défends mais à travers elle, ma voix porte pour tous les faibles du monde.

Reflet d’Afrique :  Il n’y a pas qu’en Afrique seulement que vivent les plus faibles ? Pourquoi vous n’avez pas mentionné d’autres lieux de ce monde ?

Assia Boucary MAIGA : Vous avez je suis la voix de la vérité. Je défends aujourd’hui concrètement les intérêts de mon Afrique, dont l’exploitation est vraiment illustrative aujourd’hui. Qui est surtout les lèvres alors qu’elle ne mérite vraiment pas ce traitement méprisant.

Reflet d’Afrique : Dans le chapitre cinq de votre ouvrage. Vous essayez de dissocier l’islam au radicalisme.  Alors que ces terroristes revendiquent le djihad comme une méthode de purifier les impies. Comment réagissez-vous face à ce dilemme ?

Assia Boucary MAIGA : Enfaite, je pense que ceci n’est plus un scoop. Nous savons tous que ces gens n’ont jamais été pour l’islam, parce que cette religion ne revendique pas ce qu’ils sont entrain de revendiquer. L’islam est une religion de paix, d’amour. Tout ce qu’ils disent est une politique de dissimuler leurs caractères authentiques. Ce sont des hommes d’affaires et des narcotrafiquants barbus. Ils sont là pour l’intérêt de la France et de l’Europe. Des mercenaires qui n’ont rien à voir avec l’islam.

Reflet d’Afrique : Sur la problématique des indépendances des pays africains. Vous blâmez fortement les leaders de l’après « soleil des indépendances ». Pensez-vous que les pères des indépendances sont-ils des saints en soi ?

Assia Boucary MAIGA : Je ne pense pas qu’ils soient des saints. Tous les êtres humains ont des défauts, je ne clame pas qu’ils soient des saints. Néanmoins ils étaient plus consciencieux que ceux actuellement au trône. On peut avoir des défauts mais au moins il faut avoir un minimum de conscience professionnelle surtout lorsqu’il s’agit de nation, de son pays, de terre de ses ancêtres. Eux au moins, ils ont fait de leur mieux pour sauvegarder ce que nous, nous avons trouvé comme héritage. Donc c’est à nous, de nous battre pour que la future génération soit à l’aise. Malheureusement nous sommes en train de faire tout le contraire.

Reflet d’Afrique : Des allégations millimétrées scandant, la conspiration et l’immixtion des autorités françaises dans les affaires endogènes de leurs ex colonies. Des proposasses courants au sein d’une élite juvénile africaine. Ces mots ne sont-ils pas une manière éternelle de se victimiser ?

Assia Boucary MAIGA : Pour moi, ce n’est pas une manière de se victimiser dans la mesure où je n’accuse pas que la France. J’accuse à trois niveaux, d’abord la France, ensuite nos dirigeants africains (c’est eux qui sont à la base de tout), et la permissivité du peuple africain. Le peuple africain est trop laxiste face à tout ce qui se passe sur son territoire.

Reflet d’Afrique : Quel message savez-vous à lancer à la jeunesse africaine ?

Assia Boucary MAIGA : Le message que je lance à la jeunesse africaine, c’est à peu près ce que Amadou Hampaté Bah avait lancé à cette jeunesse. C’est que la jeunesse africaine doit-être consciencieuse, ce qui sont à l’Occident doivent savoir que là-bas ce n’est pas leur patrie. Qu’il sache qu’ils ont laissé derrière eux la terre de leurs ancêtres. Où qu’ils soient, ils doivent avoir cette audace de valoriser l’Afrique. Et ceux qui sont ici doivent être consciencieuse de notre statut actuel de misérable, parce que nous sommes aujourd’hui misérables. Tout le monde se moque de nous. Donc qu’ils se lèvent et qu’on se battent ensemble pourque l’Afrique soit la mère de l’humanité.

Mohamed CAMARA

Ismaïla Samba Traoré : de producteur réalisateur de radio à historien de la littérature malienne

Reconnu de tous comme historien du livre et de la littérature au Mali, Ismaila Samba Traoré joue un rôle prépondérant dans la préservation et la valorisation de la culture malienne. Il possède une riche bibliographie qui fait de lui un écrivain de renommé nationale et internationale. Mais comment est-il arrivé à ce stade ? 

Dans ses bureaux à Baco djicoroni ACI, Ismaïla Samba Traoré présente l’allure d’un homme très actif, téléphone fixé à l’oreille gauche, les yeux rivés (sans lunettes) sur son écran d’ordinateur, ou sur son agenda qu’il remplit au fur et à mesure de ses engagements, il peut néanmoins soutenir une conversation, tout en passant les doigts sur son clavier d’ordinateur et un œil sur son agenda déposé à portée de main sur sa table de travail. L’homme est grand et bien bâti, de teint noir, cheveux blanchis, assez souvent drapé dans un long boubou.

Une vie à l’horloge

Cet homme hyperactif, écrivain, éditeur, chercheur, animateur d’un réseau de consultants, président d’associations et de collectifs, est un homme auquel on recourt volontiers dans le milieu, en sa qualité d’historien de la littérature malienne, de point focal pour fournir les contacts des professionnels du secteur de la culture.

Il partage ses journées entre relecture des manuscrits, accueil et orientation des auteurs, élaboration et conduite de programmes de recherche. Toujours souriant, à peine un appel terminé il peut décrocher un autre téléphone, et de sa voix grave, il oriente en quelques mots ses correspondants.

Le plus souvent, il lui arrive aussi de consacrer toute une matinée aux entretiens avec ses auteurs, notamment les jeunes qui se lancent dans cette aventure de l’édition sans pour autant avoir une véritable expérience dans le domaine. Il a produit, à compte d’éditeur au cours des derniers mois, pas moins de dix ouvrages d’auteurs débutants et moins jeunes. « Ce sont mes coups de cœur », confie-t-il en souriant.

Ismaila Samba ne fait pas économie de sa personne, se donnant sans compter. La dernière née de ses initiatives, c’est la mise en place du Collectif Urgence Ecoles, un regroupement d’écrivains-enseignants qui ont décidé de se battre pour que leurs ouvrages parviennent aux destinataires que sont les enseignants et scolaires. Puisque les formules d’achat de livres sont à l’arrêt depuis de nombreuses années. « La refondation et requalification de l’école malienne se fera avec les contenus que nous produisons, ou ne se fera pas. Puisque l’Etat ne fournit pas les écoles en livres, nous avons décidé d’explorer la piste des Sponsors et ONG, ainsi que des leaders politiques, qui disposent de projet de société qui font la part belle à l’éducation ». Il avoue volontiers être insomniaque, dormant peu, très tôt réveillé, conséquences d’un mode de vie contracté depuis l’adolescence. 

Le scénariste des coups d’Etat

Producteur réalisateur à la radiodiffusion nationale du Mali au début de sa carrière de 1972 à 74, il décroche une bourse pour entreprendre des études universitaires en France, entre 1974 à 1982. Passionné par l’écriture depuis l’adolescence, il bascule définitivement dans ce choix de vie central à partir de la parution en 1982 de son premier roman, « Les ruchers de la capitale ».

Certains centres d’intérêt ont valu à ce roman de figurer au programme des écoles, comme la description de la famille, de l’exode rural ayant engendré les quartiers spontanés des nouvelles villes africaines, les clivages entre riches et démunis, l’ouvrage se prête à une lecture politique de la post indépendance. Il a prophétisé le système manipulateur mis en œuvre par les auteurs de putsch au Mali. Qui se met en mouvement entre rumeurs et manipulations…

Les écrits de M. Traoré font l’objet d’exposés, de mémoires et thèses dans des universités en Afrique et en France.

La Sahélienne, au-delà de l’édition

La maison d’édition de livres qu’il a fondée en 1992, La Sahélienne, est la plus connue au Mali. Elle dispose d’une librairie, d’une bibliothèque de lecture et d’un espace consacré aux conférences-débats.

La Sahélienne compte plusieurs collections, consacrées aux romans et récits, aux essais et documents, à la littérature de jeunesse, à la poésie. Sa production de livres en langues nationales compte pour un quart du total de ses publications, en toutes langues nationales du Mali. En plus de l’édition, La Sahélienne est aussi un centre de recherche et de consultation avec un solide réseau de consultants. C’est aussi une structure de formation et d’éducation non formelle.

Implantée dans un grand espace de deux étages, entouré de verdure, le cadre comporte une belle terrasse qui accueille en longueur de journée du monde. En plus des clients qui passent pour des achats de livres, cet espace est un véritable lieu de coworking, où des auteurs viennent le plus souvent se réfugier pour bénéficier non seulement des commodités du lieu, mais aussi et surtout des expériences du vieil écrivain.

Référence de la culture malienne

« C’est un baobab pour le Mali » confie enthousiaste un jeune auteur qui le fréquente depuis quelques années. « Ses romans et chroniques, ses essais sur les filières artistiques et agricoles, ses monographies, recueils de poésie, livres pour enfants, en français aussi bien qu’en bamanankan, représentent une  contribution importante dans la construction et la diffusion des savoirs sur notre pays ».

Une autre confie : « C’est son esprit d’ouverture, son humanisme et surtout son amour pour son métier qui sont frappants au premier contact ».

Ismaila Samba Traoré est président du centre malien de Pen International,  et du mouvement Malivaleurs. En  2019 il a reçu la haute distinction de Chevalier de l’Ordre national du Mali.

On raconte de Ismaila Samba Traoré qu’à travers le Collectif Solidarité Ecoles fondé depuis 1994, et plus tard avec le Mouvement Malivaleurs, il a réussi à faire sortir beaucoup d’enfants de la déperdition scolaire en raison du manque de moyen de leurs parents. 

La riche expérience de Ismaïla Samba Traoré vient non seulement de son poste de producteur réalisateur, mais aussi, et surtout de ses fonctions de directeur national, de conseiller technique, de chargé de mission et de chef de cabinet, au ministère de la Culture et au ministère de l’Éducation de base.

A 72 ans, IsmaïIa Samba Traoré n’a rien perdu de sa rigueur et de sa vigueur. Car « En ce moment, je prépare la relève à La Sahélienne…Je vais me consacrer bientôt, si Dieu veut, à la relecture et publication des nombreux écrits qui attendent dans mes ordinateurs, fruits de mes longues années de recherche et d’écriture. », ne cesse-t-il de rappeler au besoin.

L’homme est à l’aise avec toutes les générations qui fréquentent ses espaces. Malgré l’âge et ses nombreuses occupations, il a une mémoire d’éléphant. C’est véritablement un homme-mémoire, à tous points de vue.

Fousseni Togola, Journaliste-Blogueur

Source : Phileingora

L’analyse du journaliste-blogueur Fousseni Togola sur l’ouvrage de Hadèye Fofana

Livre : « Et si tu ne me trouves pas au paradis » ou la recherche du tableau manquant d’une vie

Publié dans les éditions La Sahélienne, « Et si tu ne me trouves pas au paradis » de Hadèye Fofana est un roman plein de signification dans un monde en quête de repères.

« Si tu donnes aux autres le pouvoir de définir ton identité, tu passeras ta vie à l’effleurer, sans jamais l’embrasser », lit-on dans cet ouvrage de Hadèye Fofana. Un passage qui résume bien cet ouvrage dont le thème central est la quête d’identité. 

Tiala, le personnage principal du roman, après des années d’absence de sa ville, y retourne et désire désormais découvrir son histoire à travers la vie de son grand-père, Pierre. Sauf que la vie de celui-ci manque un tableau que ce dernier a tenu en secret jusqu’à sa mort.

La quête de ce tableau manquant, qui devra permettre à la jeune fille de découvrir son identité, la conduira de Paris à Gao en passant par Dakar et Bamako. Une quête de soi nécessaire pour trouver des réponses à ses interrogations incessantes ainsi qu’aux critiques acerbes des autres.

Ce roman aborde plusieurs thématiques transversales : l’insécurité au Mali, la problématique de l’emploi des jeunes, la perte de l’identité, la tradition, etc.

Le style de l’auteur rend la lecture et la compréhension assez facile. 

« Et si tu ne me trouves pas au paradis », qui est une phrase de fin de vie, est l’un des meilleurs romans que j’ai pu lire ces dernières années. Du début jusqu’à la fin, l’auteure maintient son lecteur en haleine.  Tiala réussira-t-elle à retrouver le tableau manquant ? A vous de le découvrir !

Malgré tout, s’il y a un ouvrage à recommander aux jeunes d’aujourd’hui, c’est bien ce roman. Car la voie empruntée par Tiala, la quête de soi, est le chemin qui conduit « à la connaissance de soi » et par ricochet au vivre-ensemble.

Le message qui m’a paru le plus essentiel dans cet ouvrage est la multiplicité de nos identités et le courage de les découvrir. Sur ce point, ce roman est non seulement sociologique, mais également anthropologique.

Togola Fousseni, Journaliste-Blogueur, Ecrivain et Professeur de philosophie

Souvenir de la journée du mérite littéraire 2016, Discours d’ouverture du président de PEN MALI / MALIVALEURS Ismaila Samba TRAORE

ismaila samba

Ismaila Samba TRAORE, Président de Pen Mali / Malivaleurs

 

Documenter l’histoire sociale, documenter les trajectoires des hommes publics, documenter les crises, documenter les processus de paix, les formules et stratégies qui ont permis d’aboutir, documenter les communautés et l’histoire des établissements humains, documenter les déviations et les dérives politiques, documenter les problèmes quotidiens, faire le plaidoyer de la paix sociale, de la diversité et de la différence depuis l’école, tel est le crédo des écrivains, nos devanciers comme nos contemporains.

La Journée du Mérite littéraire s’adresse aux acteurs de notre famille du livre, hommes et femmes patriotes, travailleurs infatigables, bâtisseurs, penseurs, citoyens exemplaires…Certains ont subi tortures et déportation, d’autres ont perdu la vie.

En organisant cette cérémonie et les remises de distinction qui vont suivre, nous avons voulu mettre l’accent sur ces modèles, les actes majeurs qu’ils ont posé, les leçons que peut tirer la jeunesse pour se doter de valeurs, pour innover, bâtir.

Susciter un mouvement national pour affecter des noms aux rues (au nom des personnalités vivantes ou disparues, écrivains, hommes publics, médecins, enseignants, militaires, leaders traditionnels, etc.). Lesdites rues seront pavoisées par les portraits géants que nous avons créés sur ces figures modèles.

A ce stade, permettez-moi de saluer la mémoire de Moussa Travélé, Fili Dabo Sissoko, Ibrahima Mamadou Ouane, Yoro Diakité                                                                   Massa Makan Diabaté, Moussa Konaté,                                                                   Modibo Konaté…

Qui sommes nous et quelle est notre place dans l’histoire de la construction de la nation?

Parlant de l’esprit qui a présidé à la création de l’emblématique maison d’édition Présence Africaine, Jacques Rabemananjara disait ceci au Congrès des écrivains et artistes noirs de 1956: « tant d’injustices et les redresser, tant d’aliénation et les combattre, Présence Africaine est fille de ces préoccupations » fin de citation. Ecrivains et éditeurs se sont longtemps reconnus dans cette formule de Rabemananjara. Cette profession de foi des précurseurs de la littérature et du combat politique a alimenté le combat de toute une génération car Présence Africaine a préparé les élites à la lutte pour l’indépendance, aidé l’école et l’université en Afrique et façonné la conscience des nouvelles élites.

De même, Aimé Césaire a eu ces mots que des générations de militants ont repris : « Faites de moi la bouche de ceux qui n’ont pas de bouche ».

Artiste engagé ! Ecrivain engagé !

Ces terminologies voulaient dire quelque chose pour les artistes et écrivains d’une certaine génération…Qu’en est-il aujourd’hui ?

Les professionnels du livre et les artistes contribuent de manière décisive à son développement. Un système éducatif et une société modernes reposent sur bien des acteurs et produits, au nombre desquels des écrivains, des éditeurs, des bibliothèques, libraires et bibliothécaires, des professeurs de littérature, etc.

La politique éducative scientifique et culturelle des pays développés intègre à l’école les ateliers de créativité artistique sur le dessin, la musique, la danse, l’écriture, comme complémentaires de l’enseignement des disciplines classiques. Mieux, comme déclencheur de capacités pour les jeunes enfants. Ecrire s’apprend dans le sens où il faut pratiquer les techniques, apprendre à structurer la pensée, à faire des synthèses, à s’exprimer correctement. L’enseignement des techniques d’expression est à la lisière de plus d’une discipline, car il fait intervenir la communication, la stylistique, les techniques de l’expression orale.

A partir de l’école, il faut servir au jeune enfant des enseignements sur les questions éthiques, la citoyenneté, l’histoire des idées, l’histoire de l’Afrique, la philosophie de l’histoire. En somme comme le dit l’UNESCO « …édifier les remparts…dans la tête des nouvelles générations »

La filière du livre au Mali est tributaire d’un contexte. Editeurs et écrivains sont en effet des penseurs, des acteurs indépendants, des opérateurs privés d’une filière qui, pour atteindre ses objectifs, a besoin que soient élaborées et conduites des politiques publiques adéquates.

Il existe un environnement, complexe, qui explique certaines particularités du livre et de l’écrit dans notre société malienne.

Nous sommes, dit on, une société malienne qui aurait des particularités. On entend tous les jours cette formule : « nous sommes une société d’oralité. On ne lit pas, on parle, on raconte. » En somme une société de la grande palabre !

Ceux qui véhiculent ces lieux communs prolongent sans le savoir les préjugés coloniaux visant à déconsidérer les sociétés dominées. L’on oublie volontiers que toutes les communautés humaines fonctionnent à l’oralité. Lorsque se pose la question de la fixation des patrimoines et des modes de transmission des savoirs, elles se tournent vers le support écrit. A cet égard la société malienne, elle aussi, est une société de l’écrit. A travers son patrimoine de manuscrits anciens, notre pays se trouve à la tête de la plus grande bibliothèque précoloniale d’Afrique au sud du Sahara. Disant cela, nous faisons référence aux manuscrits dits « de Tombouctou », c’est-à-dire à tous les écrits réalisés par les lettrés maliens depuis le temps des grands empires. Il faut se rappeler que ce rayonnement intellectuel est allé de pair avec le rayonnement militaire, politique et diplomatique du Mali précolonial.

L’environnement du livre peut être schématisé à travers trois facteurs:

Premier facteur à considérer : une société qui, dit-on, ne comprend pas toujours que l’on se mette à part, pour écrire ou lire. Le mode de communautarisme dont il s’agit s’opposerait aux formes d’individualisme … 

Deuxième facteur : une industrie du livre qui fut en pleine émergence jusqu’à l’effondrement généralisé provoqué par la crise malienne. Avant la crise, éditeurs et libraires se plaignaient de l’étroitesse du marché, du faible pouvoir d’achat des lectorats, des coûts de production très élevés qui rendent le livre produit sur place ou à l’étranger inaccessible pour l’acheteur local.

Troisième facteur enfin : Des écrivains. Ici, il n’est pas nécessaire d’évoquer toute la production littéraire de notre pays. De Moussa Travélé à Fily Dabo Sissoko, Ahmadou Ampathé Bâ, Seydou Badian Kouyaté, Massa Makan Diabaté, Moussa Konaté…la place du Mali dans la production littéraire africaine est remarquable. Ce qui l’est moins, à nos yeux, c’est l’autre versant de cette production, à savoir la littérature grise, la production universitaire, les écrits politiques, les grandes analyses, la réflexion sur les concepts.

Les maliens semblent moins productifs que les sénégalais, camerounais, ivoiriens, congolais…Un des porte-voix de cette réflexion critique africaine est sans conteste Aminata Dramane Traoré, altermondialiste bien connue qui prend place sans complexe dans le débat mondial.

Par écrivains, nous ne parlons pas seulement de la littérature francophone, mais de l’ensemble du patrimoine malien. On ne peut évoquer les bibliographies maliennes et même africaines sans mentionner l’important d’écrits et bibliothèques familiales dont Tombouctou et Djenné sont les porte-flambeaux.

Sous l’impulsion d’Amadou Ampathé Bâ, l’Unesco s’est penchée dans les années 60 et 70 sur les patrimoines tant écrits que de tradition orale. Pour les traditions orales, il s’agissait d’impulser un programme de collecte systématique auprès des détenteurs de traditions. Dans ce schéma, tout vieillard était considéré comme une bibliothèque…en péril. (cf célèbre formule d’A A Bâ)

Dès 1967 l’idée d’un centre consacré aux manuscrits anciens est évoquée à Tombouctou par Boubou Hama du Niger et Mahamane Alassane Haïdara, homme politique malien. En 1973, le CEDRAB est créé à Tombouctou. Au fur et à mesure, il va collecter à tour de bras. Aujourd’hui la structure qui s’appelle désormais Institut des Hautes Etudes de Recherche Islamique Ahmed Baba disposait, toujours avant la crise, d’un fonds de plusieurs dizaines (trente mille) de manuscrits consacrés à la théologie, l’histoire, la physique, la gouvernance, les droits (femme, esclave) la musique, la pédagogie, et beaucoup de Fatwa, (points de vue sur un problème donné).

I-             Les acteurs et les politiques

Qui sont les acteurs qui documentent la bibliographie malienne ?

Au Mali, l’éditeur et l’écrivain sont deux acteurs qui évoluent ensemble depuis une cinquantaine d’années. Ensemble ils ont affronté les combats de la désaliénation et de la lutte pour l’indépendance, ils ont contribué à doter le système éducatif malien et africain et aujourd’hui ils aident à bâtir une industrie ou si vous préférez une économie de la culture.

Politiques éducatives et culturelles                                                                                Le régime de la première république (1960-1968) a lui aussi construit des logiques du même type. Selon Moussa Tati Kéïta[1], « la pédagogie du système colonial était fondée sur le déracinement des élites. Soixante années de cette pédagogie nous ont éloignés des valeurs africaines authentiques.»

Un des premiers instruments mis en place pour rétablir les valeurs battues en brêche, ce fut une politique éditoriale, incarnée par la Librairie Populaire du Mali (LPM), qui est née en 1961 d’un patrimoine privé, l’Etoile Noire d’Ahmadou Djikoroni Traoré que je considère personnallement comme le père de l’édition malienne. La LPM va rendre disponible en tous lieux du territoire national les livres et matériels pédagogiques nécessaires aux apprentissages. Mieux la LPM va susciter en son sein la naissance des Editions Populaires du Mali en 1965. Le destin de la maison d’édition d’Etat sera chaotique. La plupart des livres programmés sortent de presse après le changement de régime intervenu en 1968. Après une période faste (années 70) qui voit la publication de nombreux écrits, dont le premier ouvrage de Massa Makan Diabaté, des écrits de Issa Baba et Issa Falaba Traoré, des études de Rokiatou N’Diaye Kéïta et Bokar N’Diaye, etc. la structure va marquer le pas au cours des années suivantes, entraînant des polémiques orageuses entre ses dirigeants et les animateurs de l’Union des Ecrivains. Seule l’imprimerie (nationale) a continué à tourner, la politique d’édition fut délaissée jusqu’au bradage de la structure, biens immobiliers, équipement et fonds éditorial compris, à un opérateur économique de la place.

L’opérateur économique à qui ce patrimoine est cédé va créer les EDIM sa, avec un pendant imprimerie très puissant (Graphique Industrie). Il se lance dans  l’édition de manuels, dépossédant ainsi les derniers barons de l’édition française qui continuaient à régner sur ce secteur. Les EDIM règnent depuis sur le marché du manuel scolaire avec Jamana, Donniya ainsi que des imprimeries. Des structures opportunistes d’émanation politique, prélèvent également leur part de marché du manuel scolaire contribuant à quelques uns à capturer ce marché qui fait l’essentiel du chiffre d’affaire de l’édition..

Lorsqu’Alpha Oumar Konaré crée la Coopérative Culturelle Jamana en 1984, il met en place presqu’aussitôt, en 1987, les Editions Jamana, première maison d’édition non étatique. Konaré et son équipe mettent l’accent d’entrée de jeu sur le livre en langues nationales, concepts et visions débattus au sein d’un cercle de militants, connu sous le nom de Groupe bembakan dungew, animé par Abdoulaye Barry, Mamadou Doukouré « V zéro », Issa N’Diaye, Drissa Diakité, Alpha Oumar Konaré…

Il est frappant de constater que ceux qui vont s’engouffrer dans l’édition, après 1990, à la suite de la brèche ouverte dans le domaine par Konaré, ce sont surtout des écrivains. Chiaka Diarrassouba (Fayida) dont la structure est née dès le début des années quatre-vingts, Ismaïla Samba Traoré (La Sahélienne), Moussa Konaté (Le Figuier), Dramane Traoré (Kalandiya), Samba Niaré (EDIS). Des fils d’écrivains arrivent au courant des années 2000, en 2è génération après leurs parents : Igo Diarra (Balani’s) et Kadiatou Konaré Dramé (Cauris Edition). Comme cela arrive souvent dans la profession, une directrice éditoriale créé sa propre structure : il s’agit de Maïra Sow des éditions Asselar. Une des dernières nées, Editions Tombouctou, est également le fait de deux jeunes écrivains, la romancière Aïda Mady Diallo et le nouvelliste Ibrahima Aya.

Côté écriture en langues nationales, nous sommes encore aujourd’hui dans l’ère des transcripteurs et des traducteurs: il existe peu d’ouvrages de création pour l’instant, hormis les écrits de Dramane Traoré, Demba Aboubacar Pamanta, Samba Niaré et Ismaila Samba Traoré.

Le cas spécifique de la littérature de jeunesse au Mali                                               Le premier intervenant qui a ciblé cette catégorie de livres, dès 1985, est Chiaka Diarassouba (Fayida). Grâce au soutien de la Direction de l’Enseignement Fondamental dirigée à l’époque par Oumar Issiaka Ba, il réussit à faire acheter ses productions par l’école malienne. Il s’agissait de petits  récits, écrits et illustrés initialement par l’Ecole de Formation des Educateurs Préscolaires. L’adaptation littéraire en a été assurée par Chiaka Diarassouba lui-même.

Il s’agit des brochures illustrées suivantes :Birama et son père, Une ruse de N’Golo,

l’Abeille racontée aux enfants, Pourquoi la grenouille est-elle dans l’eau.

L’éphémère Revue Fayida qu’il fonde enregistre la collaboration occasionnelle d’Ismaila Samba Traoré et d’Abdoul Aziz Diallo. Les petits récits y côtoient des contes et des jeux. Il ne s’agissait pas encore de bandes dessinées.

Lorsque naissent les Editions Jamana en 1986-87, une collection de livres pour enfants intitulée Céjuguni est annoncée, mais il faudra attendre 1990 pour voir la parution du premier titre Maïa et Taïa d’Ismaila Samba TRAORE, par ailleurs directeur de collection à Jamana. Les images sont de Louis Frégier. A la suite de Jamana et La Sahélienne, les éditions Donniya, le Figuier et plus récemment Assélar et Balani’s ont mis sur le marché des livres pour enfants, bandes dessinées et récits illustrés.

III-2 Infrastructure

Aujourd’hui, nous devrions « infrastructurer », pour parler comme le Pr Joseph Ki Zerbo. Infrastructurer, c’est créer les conditions de développement pour toute la chaîne du livre. Ici, plus que dans d’autres filières, la part des écrivains et éditeurs dans l’atteinte des objectifs est très grande. Professionnaliser les métiers, s’organiser pour maîtriser les coûts et les circuits, obtenir l’aval du système financier, représentent des modes opératoires incontournables, mais qui ne peuvent se faire que si l’Etat veille aux bons principes.

S’agissant des objectifs qualitatifs recherchés par l’école, les professionnels du livre contribuent de manière décisive. Un système éducatif et une société modernes reposent sur bien des acteurs et produits, au nombre desquels des écrivains, des éditeurs et des livres.

La politique éducative scientifique et culturelle des pays développés intègre à l’école les ateliers de créativité artistique sur le dessin, la musique, la danse, l’écriture, comme complémentaires de l’enseignement des disciplines classiques. Mieux, comme déclencheur de capacités pour les jeunes enfants. Ecrire s’apprend dans le sens où il faut pratiquer les techniques, apprendre à structurer la pensée, à faire des synthèses, à s’exprimer correctement. L’enseignement des techniques d’expression est à la lisière de plus d’une discipline, car il fait intervenir la communication, la stylistique, les techniques de l’expression orale.

En guise de conclusion                                                                                                     En ce moment, une certaine perplexité caractérise le monde du livre et de l’écrit. Après Sartre et Rabemananjara, un écrivain, un artiste c’est quoi, en définitive? Et à quoi sert-il ? Peut-on dire qu’il s’agisse encore d’un statut et d’un produit stratégiques ? Cet écrivain ou cet artiste, peut-il changer la société et le monde ?

Pour l’Afrique, en cette étape, l’écrivain et l’artiste demeurent plutôt des transcripteurs des mémoires menacées de disparition, des passeurs des savoirs, de la singularité et de l’inter culturalité, des penseurs qui s’adressent à l’Afrique, qui l’aident à réfléchir, à penser, qui se battent pour que le continent ne soit pas le consommateur passif des produits et concepts créés par les autres.

Disant cela, je ne pense pas seulement aux littéraires, mais aux artistes, aux opérateurs culturels, à tous ceux qui, toutes disciplines confondues, peuvent traduire l’Afrique. Nos sociétés, partie prenante dans le monde, ne participent pas assez aux réseaux mondiaux de production et de diffusion des contenus à caractère culturel, éducatif, scientifique, etc. Nous ne contrôlons même pas ce qui fait notre image.

Le livre et les arts doivent plus que jamais « transcrire l’Afrique », afin de produire des contenus. La « création de contenus », comme objectif de développement de la recherche, ne ressemble pas aux  idéologismes qui ont calibré la mission de l’écrivain et de l’artiste au cours des années pré et post indépendance. C’est une nouvelle réalité, à satisfaire.

Je m’interroge : Que vaut la capacité de créativité de nos communautés de plus en plus projetées par le satellite sur la toile mondiale?

Que peut le fonds culturel africain pour aider nos sociétés à atterrir sur la toile mondiale sans préjudices pour ses enfants ?

Nous avons besoin, de toute urgence que soient actionnés deux schémas de travail: la créativité d’un côté et de l’autre la production de la pensée.

– La créativité d’abord. La production d’une pensée, de produits et biens culturels, s’opère dans un contexte de plus en plus extraverti. Les dérives de la gouvernance actuelle en Afrique a pour noms fraudes, clientélismes ethniques et régionalistes, corruption des élites et maffia émergentes, toutes choses qui entraînent de grandes fractures sociales et économiques. Des antivaleurs militent contre les principes de justice, d’équité, de travail bien fait, d’argent gagné à la sueur de son front, de probité, etc.

– La production de la pensée. Ce sont les dirigeants africains qui ont le pouvoir. Les sociétés civiles instrumentalisées et les secteurs privés émergents ne comptent pas. Alors qui peut actionner une renaissance des idées ? Comment actionner une renaissance démocratique après les dérives des vingt dernières années?

Quand nos dirigeants parlent de culture, on a l’impression que c‘est un territoire à part. Mais en fait les actes publics ne reconnaissent que le jembé fola et les cantatrices. La culture, c’est en gros et en vrac. C’est tout juste si certains admettent que la pensée soit la culture, puisque la dynamique de production de laboratoires de pensées c’est ailleurs. C’est ailleurs qu’il ya les think tanks.

Si vous partez de cette rencontre en disant qu’il faut refonder l’Afrique en partant de sa culture, ces caciques vont être rassurés, car ils penseront avoir entendu des lieux communs, ce qui ne les inquiète pas.

La colère couve dans la famille du livre. Elle pourrait, devrait prendre la forme d’une révolte. Les écrivains sont aujourd’hui dans un devoir d’interpellation. Au nom de la pensée critique. Au nom de la mauvaise gouvernance des affaires publiques qui frappe de plein pied les professions, privant votre enfant, nos enfants, de l’outil indispensable aux apprentissages, à savoir le livre.

Où se situent les responsabilités ? Elles se trouvent au niveau de ceux qui refusent que la littérature soit le reflet de leurs travers. Mais qui au vu et au su de l’histoire détournent les institutions à leur profit, encanaillent la pratique politique, font des milliards comme d’autres font des bébés.

Elles se situent à notre propre niveau, car il nous faut être plus solidaires, plus créatifs, plus combattifs.

Je vous remercie

 



[1] entretien réalisé en Octobre 2005 à son domicile

Un éditeur face au principe de mémoire Par Ismaila Samba TRAORE, Directeur de La Sahélienne Edition, Président de PEN MALI/ Malivaleurs

Ici, nous vous proposons un texte de Ismaila Samba Traoré, Directeur de La Sahélienne Edition, éditeur du livre « Le Mali sous Moussa Traoré ». Le texte intitulé « Un éditeur face au principe de mémoire » doit contribuer à faire taire tous ceux qui attaquent, sans trop d’arguments, l’éditeur du livre « Le Mali sous Moussa Traoré ». Lisez !

Partout dans le monde, journalistes, écrivains et éditeurs remplissent leur mission de praticiens de l’écriture et passeurs des idées en élaborant des documents sur l’histoire politique des pays. Cela se traduit par différents types d’ouvrages : des biographies, des livres-bilan, des essais sur les concepts, des récits sur les mutations, les turbulences et les crises, des analyses et prises de position des personnalités publiques sur les grandes questions qui interpellent la nation.

Il arrive le plus souvent que l’homme politique rejoigne la grande famille des écrivains afin de mieux communiquer sa version des faits, son projet de société ou les arguments destinés à démonter les positions des adversaires politiques…

Partout dans le monde, la classe politique et les décideurs sont attentifs à ces -méninges qui font la force des nations qui progressent et des démocraties en construction.

Au Mali les acteurs politiques se sont peu livrés à cet exercice qui aurait pu permettre de mieux documenter les périodes de turbulences et les grandes mystiques fondatrices. Ils ont peu écrit sur les changements en douceur comme sur les révolutions, les expériences réussies et les échecs. Les hommes publics maliens n’écrivent pas sur leur action, à plus forte raison sur leur mandat lorsque vient le temps du bilan. Ils ne sont pas dans une culture de compte-rendu et cela à porté préjudice à la mémoire des faits et des évènements qui ont caractérisé la vie politique du pays. Cela a porté préjudice, dans tous les sens du terme, et nous a installés, nous maliens, dans une grande frustration.

C’est donc si difficile que ça d’écrire, pour un homme public ou politique qui a été au fait des grands dossiers de la République ?

Est-il si difficile que ça de consacrer quelques mois à écrire, pour tirer les enseignements d’une carrière, documenter les réussites et les échecs, faire le bilan afin que les successeurs connaissent l’histoire des équipements, des institutions, des réalisations en tous genres. Connaître l’histoire…pour ne pas en revivre les erreurs, comme nous l’enseigne Goethe !

Le Crédo de notre collection Mémoire

Au niveau des Editions La Sahélienne, du Mouvement Malivaleurs, du collectif d’écrivains PEN MALI, nous nous sommes toujours préoccupés de la problématique de la mémoire dans notre pays.

En parlant de mémoire, nous pensons à tous les fils de chaîne et de trame qui permettent de construire, dans la tolérance et le progrès, une société stable, consciente des erreurs et des errements à éviter, consciente aussi de ses valeurs fondamentales.

La collection mémoire s’intéresse aux Grands témoins. S’intéresse à la mémoire sociale et politique du Mali, à la fois pré coloniale, coloniale et post coloniale. Quel chantier immense ! Dit plus simplement, nous nous intéressons aux grandes pages de l’histoire politique, aux grandes fractures et aux mutations, au parcours des hommes et femmes de toutes catégories. Cela pourrait s’écrire avec vous, car vous êtes tous des écrivains virtuels, pour transcrire l’histoire de votre ancêtre, de la grand-mère ou du grand père qui vous ont enseigné les valeurs, de l’instituteur, du médecin de brousse, de l’ingénieur, du chef de village, du religieux, autant de figures qui ont marqué notre vie et celle de notre communauté, de notre pays. La collection met l’accent sur les défis individuels ou communautaires qui méritent d’être rappelés, les graves erreurs de vision politique qui nous ont entraînés dans la stagnation et les crises. Tout ça, au bout du compte, pour documenter nos compatriotes, susciter le débat sur les problèmes brûlants.

Ce que nous avons déjà réalisé dans ce domaine

Dès 2008, nous avions lancé une collection intitulée Dune verte, tournée vers la mise en évidence de la mémoire des sociétés nomades et sahélo sahariennes. Elle devait, comme cela fut écrit et annoncé, permettre l’émergence de leaders pacifistes afin que les porteurs de kalachnikov ne soient pas les seuls interlocuteurs…

A partir de 2012 nous avons monté une opération de recherche participative intitulée Transcrire la mémoire de la crise

Nous avons produit pas moins de 16 livres sur la crise malienne dont :

• Les indignés de Kati
• Le patriote et le Djihadiste
• Le processus d’occupation du nord du Mali,
• Justice transitionnelle et paix durable au Mali
• Petit chrono de la crise, etc

Nous avons organisé un concours intitulé Transcrire la mémoire de notre société en 2015 dont les résultats sont en cours de traitement.

Aujourd’hui, permettez que je salue les premiers auteurs de la collection Mémoire :

Gaoussou Diawara, Ladji Siaka Doumbia, Yehia Ag Ibrahim Haïdara, Boubacar Ba, Boubacar Mallé, Joseph Tanden Diarra, etc.

Ce livre a une histoire.

Le Pr Kanouté est un romancier, essayiste, poète et homme de théâtre qui a édité à La Sahélienne et à EDIS, des ouvrages remarquables. Je l’ai souvent taquiné en lui demandant d’écrire sur sa longue pratique du pouvoir politique sous la 2è République. Lorsqu’il m’a abordé en septembre de l’année 2015 pour me parler du projet qui nous réunit aujourd’hui, je lui ai donné mon accord de publication…C’était, je le répète, en septembre 2015. Notre maison d’édition a effectué toutes les tâches techniques et le livre a été imprimé en fin février 2016, pour une mise en librairie au tout début du mois de mars 2016. Je remercie les auteurs pour avoir fait confiance à La Sahélienne : Djibril Diallo, Oumar I Ba, Modibo Hallassi Sidibé, Pr Jean Bosco, Pr Singaré, Pr Abdramane Touré, Cheick Oumar Doumbia, Amadou Daouda Diallo, Souleymane Dembélé, et bien entendu Pr Oumar Kanouté.

Comme écrivain/éditeur, je considère que nous sommes en présence d’un document de qualité, bien écrit, présentant un enjeu certain pour le débat politique en cette période de crise : enjeu pour les jeunes qui n’ont pas connu le Mali sous Moussa, enjeu pour la classe politique, enjeu pour ses tombeurs bien entendu si l’on en juge par l’émoi suscité par la publication, enjeu enfin car nous nous trouvons en présence du plus grand succès de librairie de ce premier trimestre 2016, comme l’attestent le libraire Ba, du Grand Hotel que nous avons interrogé à ce propos. Avant même le lancement officiel de ce jour, il est presque épuisé et les libraires et distributeurs se frottent les mains.

A propos du débat, d’aujourd’hui et ceux à venir, sous l’égide de La Sahélienne ou pas         Nous avons l’espoir que la sortie de ce livre soit l’occasion d’échanger, et surtout que le livre et l’écrit fournissent l’occasion à nos compatriotes d’entrer dans un des plus grands débats de l’année…ce qui n’est pas souvent arrivé.

Pourquoi pas un grand débat entre les parties prenantes ? En ce qui nous concerne, à La Sahélienne, à cette étape, nous considérons que des auteurs ont écrit sur une page d’histoire politique de notre pays et nous assumons notre responsabilité d’éditeurs soucieux de donner la parole à tous. Que d’écrits « politiques » n’avons-nous publié depuis quelques années ! Et nous allons continuer.

Il nous faut nous rappeler que depuis quelques années, politiques, sociétés civiles et communautés débattent et brandissent le slogan : DIALOGUE RECONCILIATION.
Ces concepts reposent sur une nécessité vitale pour le Mali. Le débat rouvert par ce livre nous semble être un puissant baromètre, pour mesurer le degré d’engagement de nos élites, politiques et autres, par rapport à l’avenir, aux nouvelles générations.

Pour terminer

Je voudrais, pour terminer, inviter les universitaires et les enseignants chercheurs à aider notre pays et notre société à sortir de la terrible misère politico-intellectuelle qui est la nôtre. Disant cela, permettez que je montre en exemple l’un de nos plus grands intellectuels, j’ai nommé le Recteur Joseph Tanden Diarra, qui vient de produire un document que nous allons publier bientôt dans la collection Mémoire : Dibi Silas Diarra, correspondances de prison.

Pour mémoire Dibi Silas Diarra est ce brillant capitaine de l’armée malienne, gouverneur de la région de…..au moment du coup d’état de 1968, qui sera arrêté par la junte en 1969 pour tentative de coup d’état. Il mourra en détention en 1972 dans des conditions inhumaines.

Disant cela, je veux attirer l’attention de tous ceux qui usent de procédés d’intimidation et de chantage que nous sommes là pour le Mali, au service du Mali.
Nous ne sommes pas impressionnables ! Ni intimidables !

Biographes, à vos plumes ! Universitaires à vos plumes ! Aînés et cadets de familles, à vos plumes !

La Sahélienne, Le Mouvement Malivaleurs et PEN MALI seront toujours là, au nom du débat d’idées, au nom des principes qui guident le combat des intellectuels indépendants des chapelles en tous genres et des officines politiques.

14 Avril 2016

Ismaila Samba Traoré                                                                                      www.ismailasamba.com

Concours national « Transcrire la mémoire de notre société »

Un article est paru sur la conférence de presse du concours national  : « Transcrire la mémoire de notre société »,  initié par le mouvement Malivaleurs en partenariat avec La Sahélienne éditions, PEN Mali, le ministère de l’Éducation nationale et la radio Tabalé.

C’est un concours de recherche et d’écriture ouvert du 1er juin au 7 septembre 2015. Il s’agit de faire des investigations sur les hommes et femmes bâtisseurs, travailleurs infatigables, patriotes, citoyens exemplaires en écrivant leurs parcours. Les leçons tirées de ces récits de vie pourraient profiter aux nouvelles générations pour bâtir un pays apaisé, un Mali meilleur.

se tenir la mainn

Le concours prévoit des prix selon la catégorie d’âge (junior et senior).

Pour participer au concours, contacter la commission d’organisation :
tél. : + 223 75 71 72 38
courriel : sahelienneedition@yahoo.fr ou malivaleurs@yahoo.fr

Voir le règlement du concours sur le site du mouvement Malivaleurs.

« Sous fer », roman de Fatoumata Keïta, primé deux fois

Le roman de Fatoumata Keïta Sous fer, paru en 2013, a reçu deux prix en 2015 : le prix Massa-Makan-Diabaté et le prix de la Première dame.