Résumé: La publication du présent ouvrage de Drissa Diakité satisfait à une longue attente de la communauté des historiens de l’Afrique, notamment ceux qui se consacrent à l’histoire des grands Empires soudanais. L’intérêt historiographique de l’ouvrage «Le Mansaya et la société mandingue » réside d’abord dans son originalité au double plans méthodologique et épistémologique : l’auteur tout en recourant aux sources écrites (émanant d’auteurs arabo-berbères, de lettrés soudanais utilisant la langue arabe, de voyageurs et autres explorateurs européens) utilise concurremment les traditions orales africaines (malinké, soninké et autres), en tant que sources à part entière de l’étude du passé des sociétés soudanaises.
Drissa Diakité s’efforce en fait, de « dégager selon la modalité du jugement historique » un « axe de vraisemblance historique » à partir de «la combinaison et la confrontation de l’ensemble de ces sources ». Et c’est là que réside la portée épistémologique innovante de sa démarche marquée du sceau de l’honnêteté intellectuelle.
L’auteur très imprégné de la culture mandingue nous introduit tout d’abord dans l’univers du Manden en commençant par en exposer les origines légendaires et mythiques, les entités territoriales aux contours incertains qui le composent. S’en suit une description détaillée et captivante du terroir qui fut le foyer de l’empire du Mali avec les coutumes de ses habitants, les « mandenkaw », leur langue, ainsi que les valeurs qui fondaient leur « être ensemble ».
Le déclin de l’empire du Wagadu vers 1076 (dont il évoque le contexte) conduit à une lutte de succession mettant en compétition différents candidats dont les plus sérieux étaient les royaumes de Jara, du Sosso et celui du Manden, lequel se présente comme un pays morcelé entre différents mansaya c’est-à-dire des « royautés élémentaires » ayant à leur tête différents roitelets qui se livraient entre eux d’incessantes guerres fratricides. Celles-ci alimentaient le trafic des esclaves en direction du nord dans le cadre du commerce transsaharien. Les deux grandes figures marquantes de cette période décisive pour le Soudan « nigéro-sénégalais » sont Sunjata Keyita et Sumaworo Kanté qui apparaissent au fil de l’analyse de l’auteur comme deux personnalités certes différentes à plusieurs égards, mais qui avaient tous les deux le même dessein, celui de libérer l’ensemble du Soudan « nigéro-sénégalais » voire l’ensemble du Soudan occidental de l’emprise de la traite des esclaves dont le Manden était l’un des viviers notoires.
Le nouvel éclairage porté sur Sumaworo Kanté n’entame en rien l’aura qui est celle de Sunjata Keyita lequel, comme Sumaworo Kanté, apparait dans la plupart des traditions mandingues comme un « Nankama » un homme prédestiné, promis à la réalisation d’un grand dessein. Il est le libérateur du Manden, de retour de son exil forcé à Méma. Il réalise ensuite l’unification du Manden en le débarrassant « des exactions de la multitude de roitelets » déjà évoqués, avant de fonder l’empire du Mali.
Au fil de son investigation, la fondation de l’Empire du Mali apparait comme l’aboutissement d’un long processus que l’auteur tente d’analyser (toujours à travers le recoupement des différentes sources), tant sur le plan de l’organisation de l’espace politique que celui de la structure du pouvoir à différentes étapes de l’histoire du Manden.
Ce travail innovant de Drissa Diakité constitue incontestablement une contribution majeure à la réécriture de l‘histoire africaine, et une étape importante dans l’utilisation des traditions orales pour la restitution de l’histoire des grands Empires soudanais. Il s’agit en fait d’une histoire « multi sources » qui participe de « l’écriture de soi ».
Format: 15cm x 24cm
Nombre de pages: 230
ISBN: 978-99952-76-45-4
Parution: Mai 2021
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